Interview : MC Monin, photographe inclusive

« Intégrer un réseau sans recherche préalable, avec ses stéréotypes pour mieux déconstruire »

Peux-tu nous dire quelques mots sur toi ?

Je suis photographe et vidéaste majoritairement dans le secteur culturel et plus précisément dans le milieu hip hop. J’ai débuté l’image dans le milieu musical, étant moi-même musicienne. Et puis suite à mes études et un mémoire sur les liens entre l’institution et la rue, fascinée par la force qui en émane, sa liberté, sa révolte, j’ai commencé à me consacrer de plus en plus à la culture hip hop et sa danse, jusqu’à mettre mon image en mouvement.

 

J’ai la bougeotte, le train est un peu ma deuxième maison, j’aime rencontrer des gens, des personnalités, des manières de voir les choses, découvrir des univers, ne pas rester fixe, que ce soit physique ou mental. Mes études à l’étranger (QC, SHANGHAI) ont aussi participé à cette curiosité. 

 

De fait, je me suis penchée sur le délire de communauté. Qu’est ce qu’une communauté, comment elle se crée, et quelles sont-elles, j’aime la marge, le pas de côté.

J’ai tourné mon premier court-métrage sur le drag avant que le concept TV arrive en France, avec justement ELIPS pour qui j’avais fait la vidéo de candidature pour la sélection Drag Race. 

J’aime vraiment l’improvisation, que ce soit dans ma vie, musicale ou dans le taff de l’image, j’aime que les gens qui découvrent mon image VOIT comme je le découvre.

Et puis j’ai pensé à une série de courts-métrages qui traite de l’esthétisme auquel je prête un intérêt fort, mais un esthétisme poussé à l’extrême. Donc les drags qui récupèrent et extrapolent des codes, un second sur le bodybuilding, comment sculpter son corps en dépassant le naturel, quitte à l’abîmer, et puis le troisième sur le tuning voiture, l’investissement personnel mis dans cet objet lambda qui est la voiture, pour en faire une extension esthétique de sa propre personne.

 

L’idée n’est pas d’être didactique dans ces images, mais d’ouvrir des sphères et des regards, d’interpeller et peut-être remettre en question des croyances, on sait que l’ignorance fait du mal.

J’adore l’idée de mélange et du coup l’idée serait vraiment de pouvoir mêler tous ces publics, que la gêne auprès de certains devienne une fierté, que la communication s’établisse.

L’image n’est finalement qu’un prétexte pour satisfaire ma curiosité, croiser les milieux et (re)faire communauté.

Parce qu’une photo vaut 1000 mots

Peux-tu nous partager la photo qui peut changer le monde

Je crois pas qu’une photo change le monde mais en tout cas une photo qui interpelle.

Quel est le pire stéréotype photographique auquel tu aies été confronté ? Et ce que cela a provoqué chez toi.

J’essaie au maximum de me prémunir de la « pollution visuelle », des images bien caricaturales, pauvres en message, stéréotypées. De nature assez révoltée, j’essaie aussi de ne pas perdre trop d’énergie dans mes images à être CONTRE quelque chose, je le suis déjà pas mal dans ma vie, forcément ça se ressent dans mes projets mais ce n’est pas ça qui leade mes images. Je me focus sur ce qui me plait et go.

On prend de la hauteur avec la photographie consciente

La photographie consciente pour Spriiks c’est à la fois réduire l’empreinte environnementale des projets photo, se comporter de manière éthique mais aussi utiliser cet art pour ouvrir les imaginaires et nous inviter à adopter de nouveaux comportements.

Peux-tu nous partager 3 conseils / Bonnes Pratiques pour une photographie plus consciente ?

> Perso, j’aime improviser mes prises de vue pour être dans le spontané, dans l’instantané sur mes reportages terrain. Cela me permet de ne pas trop intellectualiser le sujet et d’être vraiment dans le moment de ce que je vois.

> Je ne fais pas les images que pour moi, j’ai du mal avec l’idée de photographier quelqu’un avec qui on a à peine parlé, voir pas, et puis l’exposer dans une galerie pour la vendre une blinde. 

> Enfin le système de diffusion influence énormément le message : mettez le même cliché dans la rue, sur Instagram, dans une galerie ou à la salle des fêtes et son impact ne sera pas du tout le même. Je me prends pas mal la tête sur la manière de montrer l’image.

Quel rôle peut jouer la photographie dans notre société ?

Elle joue un rôle énorme. La répétition créée la norme qui questionne alors la notion d’identification : c’est le problème depuis longtemps, le corps des femmes, le corps des vieux, le corps des mecs …

Ça évolue et tant mieux, peut-être un peu trop doucement parce qu’on vit pas longtemps quand même donc ce serait cool que des fois ça aille plus vite, mais c’est vrai que dans les pubs même les vieux ont l’air jeune, alors que par exemple il faudrait des vieux moches aussi quoi, entre autres. Histoire qu’on soit tous plus à l’aise sur la réalité.

« 

L’image est un prétexte

Pour créer des rencontres :

entre la photographe et les communautés,

entre les communautés elles-mêmes,

entre les communautés et le reste des gens

Pour créer des moments hybrides

Au-delà de la photo »

Si je te dis « ville », peux-tu me décrire la photographie « consciente » que tu visualises ?

Si je dois choisir un délire “ville” pour une image, je penche plutôt pour les tours d’immeubles. Le travail des lignes, ces espèces de gros blocs souvent gris, avec tout ce qu’ils représentent, je trouve que ça place déjà une ambiance, le côté accumulation qui crée pourtant un ensemble assez épuré, je l’adore pour faire du portrait sans avoir l’impression de faire une carte postale.

Découvrez les projets de MC Monin :

www.mcmonin.com
insta : @mc.monin

et ses courts-métrages :

vimeo.com/mcmonin

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